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Jean m'a dit...
Jean est un retraité. Il a vécu toute sa jeunesse à Caen, quartier de Vaucelles. Il avait 15 ans quand les Allemands ont occupé sa ville. Il a donc été témoin ce tout ce qui s'est passé, comme des centaines et des centaines d’autres habitants. Mais lui, Jean, a toujours été passionné par cette aventure extraordinaire, entre invasion allemande (dès juillet 1940) et débarquement, « l'invasion » comme l'appelaient les alliés.
Ainsi, la guerre terminée, il a fait partie de nombreuses associations jumelées avec nos alliés. Il lui arrive donc de recevoir chez lui tous les ans des vétérans, les veuves ou les membres des familles de victimes qui peuplent nos cimetières alliés. Jean fait plus et se renseigne avec toutes ses connaissances, ses relations : il ne se contente pas de visiter les cimetières, mais va sur les lieux mêmes où les drames ont eu lieu. Carte d’état-major sur la table il étudie, cherche et trouve.
Un jour, il accueille par une association une veuve dont le mari anglais pilotait un Lancaster et avait été abattu au lendemain du débarquement. Quand Jean a appris la date, l’heure, le lieu précis du crash, il palit d'émotion. Cet avion, il le connaît bien, il l’a vu traverser le ciel ce jour précis, au-dessus de sa tête, moteurs en feux, et passer en rase motte dans un bruit d’enfer, avant de disparaître et de s’écraser vers May-sur-Orne.
Il reçoit donc cette veuve et la conduit sur les lieux de la chute du bombardier. Il lui raconte l’histoire. Une partie de la population s’était pressée autour des cadavres des membres d’équipage, en présence des soldats allemands. Les gens présents exigèrent que ces aviateurs fussent enterrés dignement dans le cimetière communal. Il leur fallut de longs pourparlers pour que les Allemands excédés finissent par leur dire de faire comme ils l'entendent.
Au soir de cette visite et ce voyage dans le temps, Jean revient chez lui avec cette charmante vieille dame anglaise, très émue d’avoir pu enfin voir ce coin de Normandie où est enterré son éternellement jeune mari. Puis le repas du soir vient. La vieille dame se met à table pendant que Jean et son épouse, fixent l'air triste une louche et une passoire en aluminium accrochés au mur.
Pendant la guerre on manquait de tout et qu’il fallait se « débrouiller »; alors Jean visita cette épave de Lancaster qui est restée plusieurs mois sur place, comme tant d’épaves. Mais c’était bien sur cet avion là, et pas un autre, qu’il avait récupéré assez d’aluminium pour en faire une louche et une passoire. Les deux ustensiles étaient là pendus dans la cuisine. En se penchant un peu, notre Anglaise aurait pu les voir depuis la salle a manger. Mais jamais Jean n’a pas osé lui dire que cet aluminium-là venait du Lancaster de son mari.
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Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 24/09/2009.
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